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Donation avec condition résolutoire : le caractère impossible de la condition résolutoire n’entraîne pas la nullité de l’obligation

Pauline Neau


1En 2002, un couple a consenti une donation au profit d’une association cultuelle islamique, de parts sociales, composant l'intégralité du capital social d’une société civile immobilière (SCI). Cette donation était assortie d’une condition résolutoire imposant la création d’un lieu de culte sur les biens immobiliers appartenant à cette SCI par le donataire, dans un délai de quinze ans à compter de la donation. Or, quinze ans plus tard, aucun lieu de culte n’ayant été édifié, les époux ont décidé d’assigner l’association devant le tribunal de grande instance de Lyon afin de voir constater la résolution de la donation et de recouvrer la propriété des parts sociales de la SCI.

2Le tribunal de Lyon a rendu un jugement le 7 mai 2018, où il constate l'acquisition de la clause résolutoire et, en conséquence, constate la résolution de l'acte de donation. L’association a alors interjeté appel, demandant la constatation de la nullité de la clause résolutoire et l'irrévocabilité de la donation. L’association fait en effet valoir que la clause résolutoire d’édification d’un lieu de culte était impossible à réaliser, en raison du classement du terrain en zone à vocation commerciale.

3Dans son arrêt du 29 janvier 2019, la cour d’appel de Lyon déboute l’association de l’ensemble de ses demandes. Sur la question de la validité de la condition, elle considère en effet que la clause résolutoire stipulée ne peut s'analyser en une condition impossible dès lors qu'elle a été convenue comme une condition résolutoire. L’article 900 du Code civil, qui dispose que les conditions impossibles sont réputées non écrites, ne s’applique donc pas aux conditions résolutoires. Dès lors, la donation doit être résolue en l’état du défaut de réalisation de la condition résolutoire imposant la création par le donataire dans un délai de quinze ans d'un lieu de culte sur tout ou partie des biens immobiliers appartenant à la SCI.

4Cet arrêt est tout à fait cohérent, et s’aligne parfaitement avec les solutions apportées par la réforme du droit des contrats, issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 (dont les dispositions ne sont toutefois pas applicables en l’espèce). En effet, si la condition illicite entraîne toujours la nullité de l’obligation, le caractère impossible de la condition n’entraîne en revanche plus la nullité de l’obligation, qui résultait de l’ancien article 1172 du Code civil. Cette suppression est logique puisqu’en présence d’une condition résolutoire, l’obligation existe ab initio et elle existera toujours puisque la réalisation de l’évènement est impossible. Dès lors, il n’y a aucune raison de prononcer la nullité de l’obligation. Par ailleurs, cette solution n’est pas contraire à la protection du consentement, puisque le caractère impossible de l’évènement pourra toujours résulter d’une erreur, d’un dol ou de violence. L’acte pourra alors être annulé, sur le fondement des dispositions relatives aux vices du consentement.

Arrêt commenté :
CA Lyon, 1re chambre civile B, 29 janvier 2019, n° 18/04381



Citer ce document


Pauline Neau, «Donation avec condition résolutoire : le caractère impossible de la condition résolutoire n’entraîne pas la nullité de l’obligation», BACALy [En ligne], n°13, Publié le : 01/08/2019,URL : http://publications-prairial.fr/bacaly/index.php?id=2009.

Auteur


À propos de l'auteur Pauline Neau

Étudiante, Université Jean Moulin Lyon 3, M2 Droit notarial interne


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