La création lexicale en médecine médiévale : l’exemple des traductions françaises du Lilium medicinae de Bernard de Gordon, conservées dans les manuscrits français 1288, 1327 et 19989 de la Bibliothèque nationale de France

DOI : 10.35562/elad-silda.261

Résumés

Nous nous intéressons aux procédés de traduction et à la création lexicale dans les traductions françaises du XVe siècle d’une œuvre de médecine, le Lilium medicinae de Bernard de Gordon. Dans ces témoins se pose la question de la formation d’un lexique de spécialité, qui s’inscrit déjà dans une forme d’héritage, du fait de traductions médicales antérieures. La question de la rareté de certains termes (le cas de rempe), mais aussi la nécessité de recourir à une pluralité terminologique, développant parfois à l’outrance les cas de synonymie (le cas des causes) sont donc au cœur de nos réflexions, d’autant plus que cette médecine en français est contrainte par la tradition scolastique qui privilégie la diffusion du savoir en latin et pose la question du caractère parfois éphémère de ses créations lexicales françaises.

We look at translation processes and lexical creation in the 15th century French translations of a work of medicine, Lilium Medicinae by Bernard de Gordon. In these testimonies arises the question of the formation of a specialty lexicon, which is already a heritage tradition, because of previous medical translations. The scarcity of certain terms (the case of rempe), but also the necessity to refer to a plurality of terminology, sometimes exaggerating cases of synonymy (the case of causes) are therefore at the center of our reflection, especially since the practice of medicine in French at the time is constrained by a scholastic tradition which privileges the diffusion of knowledge in Latin and raises the question of the sometimes ephemeral character of the French lexical creations.

Index

Mots-clés

moyen français, traduction, néologisme, langue de spécialité, médecine

Keywords

middle French, translation, neology, specialized language, medicine

Plan

Texte

Introduction

La question de la néologie lexicale et sémantique est souvent abordée dès lors qu’on s’intéresse à la traduction des textes de savoirs du Moyen Âge, tant dans la perspective des études latines et hellénistes que dans celle des études portant sur la langue française, car elle permet de s’intéresser aux procédés de traduction, mais aussi à la transmission du savoir, le choix ou non de la néologie étant un indice de l’identité du traducteur mais aussi de la destination de ces traductions1. Les traductions françaises du Lilium medicinae latin du maître en médecine de l’Université de Montpellier, Bernard de Gordon, se placent dans cette perspective d’études. Nous conservons de cette practica trois fragments au sein de compilations manuscrites, les manuscrits français 1288 (A), 1327 (B) et 19989 (C) de la Bibliothèque nationale de France, et une tradition imprimée qui s’étend de 1495 à 15092. Les fragments manuscrits se distinguent par des choix, notamment dans l’agencement des fractions de textes retenues, mais aussi dans la mise en français du Lilium medicinae. Ainsi le manuscrit A apparaît plus synthétique que le manuscrit B et les indices codicologiques nous conduisent à considérer que cette compilation a pu servir à une pratique effective de la médecine. Le manuscrit C semble pouvoir se lire de la même façon, mais l’incorporation de la médecine féminine théorique du Lilium medicinae au sein de considérations de pratiques chirurgicales surprend3. Enfin, le manuscrit B est une compilation de traités médicaux conçue comme une véritable unité, mais qui pose plus de questions quant à ses usages potentiels qu’elle n’en résout. En effet, la matière médicale des trois premiers fragments fait l’objet d’enrichissements et d’ornements textuels, même si les ensembles retenus tendent vers une pratique de la médecine et se concentrent sur des maux et des remèdes courants. Les imprimés français restituent quant à eux l’intégralité de l’œuvre, véritables manuels de médecine, relativement fidèles aux textes latins. Les deux approches, celle des manuscrits et celle des imprimés, respectent l’aspect didactique inhérent à la composition latine : la practica est un genre dit pratique de la littérature universitaire médicale hérité du compendium, dont elle reprend certaines caractéristiques.

Il s’agit donc de la transmission d’un savoir de médecine scolastique, de sources principalement latines, mais aussi grecques et arabes. La langue latine utilisée par Bernard de Gordon dans le Lilium medicinae est une langue de spécialité qui se place dans la lignée d’une tradition de la pensée médicale en latin, celle de la médecine scolastique4. La comparaison de nos témoins permet de révéler les procédés mis en place afin de traduire ce lexique médical latin vers une langue de spécialité encore en formation au XVe siècle : le français médical. Les manifestations de la langue de spécialité qu’est la médecine en français au sein de nos témoins s’inscrivent dans une continuité, puisqu’elles prennent place à la suite d’entreprises de traductions de textes à caractère scientifique, comme le rappellent Ducos et Salvador [2011 : 64] :

[O]utre Aldebrandin de Sienne, qui écrit en français un traité de diététique, Le régime du corps, au XIIIe siècle, le premier texte astronomique, le Comput de Philippe de Thaon, date du début du XIIe siècle. Des textes de chirurgie fondamentaux sont traduits en français comme la Chirurgie d’Abū al-Qāsim Khalaf ibn Abbās al-Zahrāwī (Albucasis) qui, traduite au XIIIe siècle en dialecte lorrain sous le titre Triaitier de Cyrurgie, propose une terminologie dont la formation n’est pas un pur décalque : la majorité des termes sont vernaculaires, bien loin devant les latinismes ou les arabismes.

Ainsi la langue française médicale s’élabore-t-elle en puisant dans la langue française, grâce à la préexistence d’une tradition orale de la médecine qui nous échappe : il suffit pour cela de penser à la médecine populaire et à l’ensemble des corporations sanitaires qui vivent en dehors du cadre universitaire, pour n’en citer que quelques-unes, les triacleurs, les barbiers ou encore les apothicaires5.

S’interroger sur les manifestations du français médical dans nos témoins par le prisme de la création lexicale revient donc à distinguer les cas de créations lexicales des cas d’emplois avérés en langue non savante, mais revient aussi à distinguer certaines formes françaises empruntées du lexique de langue latine conservé, ce qui pose des problèmes d’interprétation dans ces textes bilingues6. Cette cohabitation du latin et du français ainsi que les choix de transposition du lexique latin sont autant d’indices sur l’usage de ces compilations que sur la figure du copiste et/ou traducteur à l’œuvre, et permet d’observer la constitution d’un lexique de spécialité, du point de vue du développement et de la pérennité des formes, notamment face aux hapax, dans un contexte de diffusion particulier.

À travers trois cas présents dans notre corpus, nous nous proposons d’interroger le rapport à la création lexicale et ses difficultés d’appréhension. Dans un premier temps, nous montrerons en quoi l’étude du lexique permet d’émettre des hypothèses sur l’identification des lectorats potentiels de nos témoins et sur l’identité des copistes/traducteurs, à travers l’analyse des multiples dénominations du cancer. Dans un second temps, nous examinerons deux cas particuliers, celui du terme rempe et celui de la création lexicale dans le système référentiel des causes. Le terme rempe nous semble être un hapax et pourrait être considéré comme un néologisme. Toutefois, l’étude de ce terme amène à reconsidérer ce parti pris et témoigne de la difficulté d’analyse du lexique médical en français. Enfin, la dénomination des causes s’est rapidement stabilisée en français, même si ce système complexe est marqué par un développement important de synonymes. L’apparition d’une nouvelle forme, la cause moyenne, interroge cette stabilité ainsi que le degré de figement des unités polylexicales qui fondent ce système référentiel.

1. Quelle(s) langue(s) dans ces témoins ?

Dès le Prologue, Bernard de Gordon définit lui-même le Lilium medicinae comme un « livre de pratique », et à l’occasion d’une recette « pour mieulx veoir ce qui est contenu dedens l’orine [et] mieulx juger des couleurs », il dresse la liste des lecteurs potentiels de son ouvrage.

Medicamen quod valet medicis, ut possint videre contenta in urina, & quod sciant bene discernere de coloribus, & valet barbitonsoribus, in medio vene et valet lectoribus & monachis, ut possint legere litteras minutas. [Imprimé latin, livre VII, chapitre 21]

Item veci une medicine qui vault aux medicins pour cognoistre lez urinez, et pour barbiers pour bien frappez ou milieu de la vaine, et pour bien lire lettre delié. [A f.137va]

Medecine qui est ordonnee et vault aux medecins, a ce qu’ilz puissentr veoir le contenu de toutes medecines et urines et qu’ilz saichent bien discerner et declarer des coulleurs. Et si vault aux barbiés, ad ce qu’ilz puissent frapper leur lance au milieu de la vene. Et si vault aux lisans, aux religieux et autres gens, a ce qu’ilz saichent lire toutes meimes heures et minutes et aussi vault aux escripvains.[B f.4v]

Vecy medecine qui vault aux medecins pour mieulx veoir ce qui est contenu dedens l’orine et affin que ilz puissent mieulx juger des couleurs. Et si vault aussi aux barbiers et cirurgiens pour mieulx ferir en la veine au milieu. Et vault aux maistres lecteurs qui lysent et aux moynes et aux autres qui lisent lettres menues. [Imprimés Livre VII, chapitre 21]

Le Lilium medicinae, dès sa composition latine, est une œuvre de vulgarisation. Bernard de Gordon oscille entre discours théorique et discours pratique, avec une visée didactique évidente, notamment par sa volonté de nommer les choses, de les décrire avec exactitude et enfin par une approche qui se veut totalisante de la matière médicale. L’acte de traduction ouvre l’œuvre à un nouveau lectorat. Par la translation de la matière médicale, l’œuvre n’est pas uniquement accessible à ceux qui connaissent le latin, soit principalement des personnes ayant reçu une éducation ou encore les universitaires, mais peut s’adresser à un lectorat plus large qui ne lit pas le latin. Le Lilium medicinae en français se destine alors aux initiés comme aux profanes en médecine7. Ce passage au français est une nouvelle étape dans la transmission des connaissances, qui sous-entend une adaptation du savoir à ce nouveau lectorat. Ainsi le premier exemple ci-dessus met-il en évidence l’importance des variations existantes entre les traductions, qui peuvent être le signe de pratiques de la médecine ou d’usages différents. On le voit bien ici, l’acte de traduction inclut des dimensions particulières à cette période et sur ces textes : se rencontrent ainsi des enrichissements, des coupes ou encore des réécritures, même si le mot à mot est la méthode de traduction la plus courante.

En outre, le lexique scientifique présent dans les imprimés comme dans les manuscrits ne relève pas des mêmes critères définitoires que ceux souhaités pour le lexique scientifique actuel. Pour ne citer que deux critères définitoires, il n’est pas toujours univoque et nous rencontrons de nombreux cas de synonymie, dont des synonymies en contexte. Un bon exemple qui permet de synthétiser un certain nombre de problèmes lexicaux soulevés par ces traductions du XVe siècle est le terme cancer8. Cancer est un emprunt au latin, qui a un premier doublet, la forme française chancre. Ces deux formes concurrentes et en synonymie absolue, sont des synonymes en contexte de aposteme, mesellerie, tumeur, ulcère et gangrène. La définition la plus représentative de la diversité d’emploi de ce terme est celle du Dictionnaire du Français Scientifique Médiéval9 : « Mortification et putréfaction des tissus de quelque partie du corps, ulcéreuse ou non ». Enfin, la forme latine, cancer, vient de l’analogie faite entre les premières observations de tumeurs et la forme d’un crabe : il s’agit d’un procédé courant de création lexicale, celui de la métaphore naturelle et/ou animalière. Cette analogie, datée d’Hippocrate, a été conservée jusqu’au XVe siècle puisque nous la retrouvons dans nos traductions :

On l’appelle chancre pour deux raisons pource qu’il a figure ronde comme cancre, secondement, car si comme le cancre tient fluement quant il quiert sa viande, ainsi ceste maladie se tient fort. Tiercement, car si comme le cancre a plusieurs longues jambes tortues, ainsi ceste maladie a plusieurs veines et diverses tortues tout entour remplies de sang melencolique. [Imprimés, I, 18]

Dans les imprimés, en plus des formes mentionnées ci-dessus, nous relevons la forme cancrene, une surabondance des formes ulcere (dix-sept occurrences relevées sur les ensembles observés), aposteme et ses dérivés (vingt-et-une occurrences), deux occurrences seulement pour la forme tumeur et la forme latine cancri marini pour désigner le « crabe de mer » dans les ensembles latins conservés et correspondant aux recettes de préparation médicinale. Le manuscrit A privilégie les formes ulcere (trois acceptions) et aposteme (une acception) et le manuscrit B les formes aposteme (neuf acceptions), mesellerie (deux acceptions), tumeur (une acception) et ulcere (huit acceptions). Dans les manuscrits A et B nous relevons également la forme cancri marini. Notons enfin que le manuscrit B emploie aussi la forme cancer dans le fragment traduit du De pronosticis de Bernard de Gordon pour désigner le signe astrologique « cancer ». Les manuscrits refusent la forme cancer, cancre ou chancre semble-t-il, si ce n’est pour l’acception latine cancri marini et le signe astrologique cancer. Notons enfin que les formes chancre, aposteme et mesellerie ne sont pas propres à la langue médicale et se rencontrent par exemple dans les textes littéraires, ce qui n’est pas le cas du terme ulcere. La question se pose aussi d’une restriction de sens des termes en fonction des traductions et/ou copies pour les termes aposteme et ulcere. Au chapitre « ordonné de fasticorum » au sein du manuscrit, la question d’une possible synonymie se pose :

Pourquoy pour evicter ledit cas au commancement tu induiras le pacient de avoir aucune facille ou difficille vomissement en quelque maniere ou cause que ce soit se ainsi n’estoit que ce feust par aposteme ou ulcus.[Manuscrit B, f.32v dit chapitre 21 –V, 8]

Cette coordination est d’autant plus intéressante qu’on a conservation d’une forme ambigüe – latine ou française – et d’une forme française. Plusieurs hypothèses s’offrent à nous pour interpréter cette forme ulcus. Premièrement, il peut s’agir de la conservation d’un terme latin. Il arrive en effet dans le travail de copie et/ou de traduction, qu’il y ait conservation de termes latins, particulièrement dans des textes qui maintiennent une forme de bilinguisme. Ce maintien de termes latins isolés peut faire suite à une erreur dans le travail de copie ou une volonté de conserver le terme latin comme forme savante s’opposant au terme français. Seconde hypothèse, il peut s’agir d’un emprunt au latin et alors d’une réduplication synonymique. Le terme est senti comme appartenant à la langue médicale française et la mention aposteme serait une glose, en quelque sorte, puisque la forme aposteme est déjà implantée dans la langue. Cette réduplication synonymique peut aussi être signe d’un affinement de sens, d’une précision qui nous échappe du fait de réalités qui nous sont trop éloignées pour être pleinement comprise. Les imprimés privilégient la forme française et marquent très clairement la disjonction, l’alternative entre aposteme et ulcus :

Se c’est l’estomac, c’est pour aulcune male complexion qui excede avec matiere ou sans matiere, ou c’est pour apostume ou pour ulceres, et briefment pour toutes choses qui corrompent viande en l’estomac et ostent la digestive et font abhominacion et fastide et ainsi que nauzee. [Imprimés, V, 8]

Ulcere et aposteme renvoient ainsi à des réalités proches quand on se place dans la perspective de la langue courante, la distinction de sens n’apparaissant véritablement que dans le cas d’emploi en langue savante : la question se pose alors des connaissances préalables des copistes et/ou traducteurs de nos témoins, en plus des indices sur le cadre de diffusion des fragments et imprimés. Ainsi remarquons-nous que le manuscrit B semble privilégier le terme aposteme avec mention des humeurs et ulcere sans, ce qui semble logique, mais non systématique, au regard des définitions proposées par le Dictionnaire de Moyen Français (DMF) et le DFSM : l’ulcère est ainsi une « altération, lésion purulente, ulcère » ; un apostème est un « terme générique » et désigne une « enflure, grosseur, causée par une corruption des humeurs ».

Le manuscrit A semble être l’œuvre d’hommes ayant des connaissances en médecine. Les erreurs sont tout d’abord minimes, comme des jambages mal tracés ou encore quelques sauts du même au même non étendus. Le lexique médical n’est pas explicité par le développement de doublet synonymique, ni par la paraphrase. Enfin, le recours récurrent aux abréviations fait montre d’une maîtrise du lexique par le copiste/traducteur et suppose une appréhension tout aussi évidente de la part du lectorat. Le manuscrit C ne manifeste pas de différence lexicale d’importance avec les versions imprimées, les divergences majeures de traduction s’opérant plus à un niveau syntaxique. Les choix lexicaux ne permettent pas de tirer de conclusion particulière. Notons toutefois que le caractère théorique de l’ensemble et les prescriptions relevant de régime de santé, font qu’il n’est conservé aucun bilinguisme : nous avons une traduction intégrale avec un lexique sans ambiguïté. Les imprimés conservent une grande abondance de formes, et souvent se distinguent les uns des autres principalement par leurs choix graphiques. Le manuscrit B est plus difficile à caractériser. La syntaxe est moins évidente que celle des imprimés et les choix lexicaux s’apparentent à ceux du manuscrit A, même si cette copie est plus riche et conserve une traduction plus conséquente du Lilium medicinae. Ces traductions semblent avoir pour enjeux une pratique effective plus ou moins supposée de la médecine, ce qui n’est pas certain pour les imprimés mais non exclu, et s’adressent à des lectorats et contextes ou usages différents10.

Comme nous avons tenté de le montrer avec l’exemple de la dénomination du terme cancer, l’étude des choix lexicaux présents dans les traductions françaises sont des indices des lectorats visés puisqu’ils participent à l’élaboration d’une vulgarisation de notre practica. De plus, ils permettent de poser des hypothèses quant à l’identité du copiste/traducteur, notamment par l’appréhension de l’état supposé de ces connaissances : ici les témoins manuscrits laissent envisager une maîtrise de l’art médecine par le copiste/traducteur.

2. Études de cas 

Le cas des désignations du cancer nous a aussi permis de mettre en évidence les multiples manières d’envisager la néologie lexicale dans les fragments manuscrits. Deux autres cas attirent l’attention au sein de notre corpus : un supposé hapax présent dans le manuscrit B, rempe, et des développements terminologiques autour de la notion de cause, qui posent la question d’un choix de traduction propre à la copie et celle de la pérennité des formes. L’étude de rempe permet de montrer les difficultés à parler de création lexicale pour les textes d’usage de la médecine, l’efficacité recherchée laissant entrevoir plutôt la possibilité de conservation de termes issus de la langue courante dans ces témoins. L’apparition d’une création lexicale au sein du système de références des causes stables interroge le degré de figement de ces unités polylexicales.

2.1. Le cas de Rempe

Le terme rempe apparaît dans le fragment du manuscrit B au « Second traicté de maistre Bernard de Gourdon qu’il a voulu nommer et intitulé Lis de medecine, remede contre yvresse », selon l’organisation du fragment de cette compilation, et qui correspond au chapitre 10 du livre II dans la composition des imprimés français du Lilium medicinae. Cette cure apparaît parmi d’autres sans lien direct apparent avec l’ivresse.

Et contre la rempe, qui est une maniere de goute, est bon ung tel remede qui est tel : Recipe. Diptain ana .I. et dimidium decoquatur in vino vel in aqua. Et avecques celle decoccion, vous fomenterés le nombre et aprés par dessus vous pourrez lier ung drap de lin. [Manuscrit B, f.16r-v, dit Le second traicté de maistre Bernard de Gourdon qu’il a voulu nommer et intitulé Lis de medecine, Remede contre yvresse]11

Le terme rempe est ici un substantif féminin singulier, défini comme étant « une maniere de goute ». Cette définition pose un premier problème : celui du terme goute. Ce terme renvoie en effet à plusieurs réalités. Deux ensembles ont retenu notre attention dans les imprimés de 1495 et de 1509. Le premier est relatif à la couperose et le second aux douleurs articulaires. Dans les imprimés, livre I, au chapitre traitant de la couperose intitulé « Le XXI de la cure de morphee », le terme rempe est absent, mais nous rencontrons la forme goute rose au sein d’un effort de définition qui donne à voir l’importance de l’organisation de la matière médicale et l’effort d’identification terminologique, préludes aux compétences médicales.

Morphee c’est defedacion maculeuse et ordure de cuir. Et saches que toutes les choses qui sont cause de lepre sont cause de morphee, car ce qui est lepre en chair est morphee en cuir. […] Et sont quatre especes de lepre, aussi sont il de morphee, mais les acteurs n’en font pas mention pour ce qu’elles ne sont pas de grande renommee et n’aviennent pas souvent, car s’elle est de sang, on l’appelle goute rose en la face et s’elle est es aultres parties, on l’appelle rougeur. Et se ladicte morphee ou infection est de cole, on l’appelle impetigine ou serpigine, mais il n’y a point de peril, comment on les appelle en medecine, car medecine est science de choses et non pas de noms si comme il est escript au second livre de morbo.

En ce qui concerne la goute, au sens de maladie touchant les articulations, plusieurs cas de synonymie apparaissent, comme au livre VII, « chapitre XIX de artetique, sciatique et podagre » :

Goute atetique, sciatique, podagre et ciragre ont grant concordance ensemble et toutes ces maladies peuent estre apellees goutes, et sont engendrees par voyes de reumatisme et distillent goute a goute.

La goute artetique correspond à ce qui est appelé aujourd’hui goutte articulaire, sciatique a conservé à peu près le même sens qu’aujourd’hui, podagre est la goutte des pieds, ciragre celle des mains [DMF ; Crealscience]. Ainsi le terme goute est-il employé en concurrence d’autres termes plus précis pour désigner cinq réalités médicales, dont deux renvoient à des réalités médicales totalement distinctes : la couperose et les douleurs articulaires.

Si nous portons notre attention à la forme du mot rempe, en élargissant la recherche aux formes potentielles auxquelles ce terme peut être rattaché, nous rencontrons la forme reupe. Cette forme apparaît tout d’abord dans la Chanson des quatre fils au vers 9952 et désigne une maladie affectant la peau.

Quant Regnau ot beü de l’erbe dont je dis / Adont fu de sa veue et sains et reclarchis ; / Dieu mercye doulcement et son cousin Maugis. / Aprés li chut la reupe et du corps et du vis ; / Aussi net demourra c’onque fu parisis.

Le terme est interprété comme reupe et non renpe dans l’édition de Philippe Verelst, édition de la branche R qu’il intitule « Renaut de Montauban » et qui correspond au manuscrit français 764 de la Bibliothèque nationale de France. L’édition propose de comprendre le mot reupe au sens de « lèpre ». Le DMF, partant de cette même occurrence, propose la définition suivante : « Semble désigner une affection dermatologique ». Cette forme reupe est déjà présente au sein du discours médical en français. Très largement attestée en ancien et moyen français, elle désigne l’éructation, et serait issue de l’étymon *rilp d’après le Französisches Etymologisches Wörterbuch [XVI, 715b]. Ce rapprochement ne semble pas convenir à l’attestation présente dans le manuscrit B. Toutefois, on peut facilement comprendre l’erreur de lecture ou le glissement entre le terme reupe et une forme possible renpe.

Dans le Französisches Etymologisches Wörterbuch, plusieurs hypothèses s’offrent à nous, concernant l’existence d’une forme renpe, dont l’étymon rampa [FEW XVI, 659a] et l’étymon *rup- [FEW, XVI, 744b], tous deux germains et de sens relatifs au domaine médical. Le premier a pour sens « crampe, petite épidémie, grippe, restant de maladie », les formes suivantes en français sont attestées : rompo, rampoyno, rampoyne. Ces trois formes renvoient à un état maladif. La forme rampe renvoie à plusieurs réalités bien distinctes, mais avec l’idée de « ramper », dont des phénomènes naturels comme le lierre. Le second a pour sens « lèpre, affection de la peau, scabie », et les formes françaises attestées sont rupo, reupi ou encore raupe qui ont le sens de « ride » ou de « rugueux », et des occurrences au sens de « lèpre, scabie » attestées. Ce dernier sens, qui serait en adéquation avec l’interprétation faite par Philippe Verelst dans la Chanson des quatres fils d’Aymon, serait toutefois très vite abandonné et ne serait attesté qu’en Allemagne. Dans cet ensemble de considérations, deux hypothèses attirent notre attention : la forme rampa, avec l’idée de lierre et de plante grimpante, qui aurait pu être à l’origine d’une création lexicale par métaphore – analogie dans ce cas à la nature – et celle de *rup- par une analogie des symptômes physiques de la maladie de peau à une peau ridée ou à un aspect rugueux.

Il est ainsi difficile de déterminer s’il s’agit d’une création lexicale ou non dans le cadre de la traduction du manuscrit B, aussi difficile que de savoir de quelle maladie il s’agit, avec certitude. En effet, on a reprise d’une forme potentiellement connue, ne relevant pas du lexique scientifique attendu, mais appartenant à la langue française. L’étymon rampa a très bien pu donner une forme rempe pouvant désigner des affections cutanées telle que la couperose, notamment par une analogie entre les symptômes physiques de cette maladie et l’idée de plante rampante, d’autant que ce terme contient aussi le sens de maladie. L’étymologie *rup-, quant à lui, désigne la lèpre et les affections de la peau ; or on sait par le Lilium que la couperose est un type de lèpre qui s’attaque au cuir et non à la chair, la morphée, qui se traduit de quatre façons, dont l’une est appelée goute rose. Le terme reupe de la Chanson de geste des quatre fils d’Aymon peut ainsi renvoyer à la lèpre ou à la couperose, mais aussi à la scabie. Le terme rempe du manuscrit B peut renvoyer à tout type de goute, mais ceci reste à vérifier. On peut donc avoir des termes en concurrence pour désigner une lèpre ou sorte de lèpre, mais aussi avoir un même terme avec deux réalités graphiques différentes par erreur de copie, soit enfin deux termes distincts aux sémantismes distincts mais de formes proches.

Enfin, nous nous permettons de revenir sur le terme goute. Goute apparait comme hyperonyme de goute rose ou goute artetique, un système où la collocation permet d’établir des distinctions claires. Mais le terme goute peut être employé seul pour désigner ces deux réalités et pose alors la question de l’usage, remettant en cause le degré de figement de ces unités polylexicales, comme nous allons le voir avec le système référentiel des causes.

2.2. Le système référentiel des causes

Le second cas d’étude est donc celui des restrictions du sémantisme du terme cause. Le concept de cause est très important pour les sciences médiévales, à l’origine du système de définition et de démonstration :

Et vecy exemple. Prenons que le cuir du patient effimere soit dur et aspre et roide et opilee, donc se on congnoist la maladie, le medecin doibt eschauffer, subtilier et ouvrir par quelconque cause, que ce soit par sumac ou par galles ou par galbanu, ou par baing d’eaue froide ou de vive ou semblables. Donc quant je cognois la maladie, je la puis curer par quelque cause que ce soit. Et ainsi les causes primitives ne font riens a la cure, nonobstant que elles vallent a congnoistre, car puis que reste que aucuns sont baigniés en eaues stiptiques, je scay que les porres sont espessis. [Imprimés, I, 2]

En médecine, définir la cause permet de poser le pronostic et l’action à mener pour guérir le patient : connaissances et causes sont en tension permanente, deux concepts en situation d’interdépendance. La traduction du système des causes est donc un stade clé dans la transposition du texte latin, ce qui explique la démultiplication terminologique observée, plus évident encore dans les cas d’énumération. Ainsi, au livre II chapitre 10, Bernard de Gordon propose-t-il un classement des causes en douze types :

[...] Cause. Les causes de douleur du chief sont trois : male complexion diverse, solucion de continuité en l’un et l’autre. Les divisions particulieres des causes de douleurs du chief sont .XII. : aulcunes sont de choses fouraines, aulcunes de dedens, aulcunes sont avec matiere, aulcunes sans matiere, aulcune douleur est maladie par elle, aulcune par accident, aulcune douleur vient de cause privee du cervel et auclunes vienent de cause lontaine, aulcune douleur vient de dedens, aulcune de dehors, aulcune douleur contient tout et aulcune partie, aulcune est forte, aulcune foible, aulcune vient soudainement ou temps de santé, aulcunes non, aulcunes ensuyvent aulcunes maladies, aulcunes non, aulcunes est nouvelle, aulcune vielle, aulcune avec reume, aulcune non. Donc douleur aulcune est des causes extrinseques et sont plusieurs telles causes et sont ramenees a .XIII. [...]. Se c’est de cause de dedens ou c’est sang qui domine ou c’est cole ou fleume ou ventosité ou melancolie, simple ou composte, ou vermes qui peuvent estre engendrés ou chief, [...] La quarte division principale : aulcune douleur vient de cause privee, aulcune de cause lointaigne. Cause privee, c’est quant la cause prochaigne et antecedente est ou cerveau et qui ne vient pas d’autre part. Cause lointaigne, c’est quant les vapeurs ou les fumees montent en l’estomac ou du foye ou de l’esplain ou de la matrice etc. [...] [Imprimés, II, 10]

Nous constatons une multiplicité des formes pour une même réalité au sein d’un même développement. Voici brièvement la liste des différentes causes que l’on rencontre : cause active, synonyme de cause agente, efficiente et faisante ; la cause coadunans synonyme de la cause conjointe et de la cause prochaine ; la cause extrinseque synonyme de la cause foraine dite aussi cause de dehors ; la cause intrinseque, synonyme de la cause de dedens ; la cause lontaigne synonyme de la cause remote ; la cause prochaigne qui est synonyme de la cause conjointe ; puis les causes formale, antecedente, materielle, privee et moyenne12. La surabondance terminologique n’est en aucun cas ici signe d’incertitude ou de flottement conceptuel. Cette démultiplication des causes, due notamment à l’effort de traduction des textes depuis le latin, mène à des attestations rares, comme la mention de cause moyenne qui se rencontre dans les imprimés au livre II chapitre 7 :

Item note que humeurs en priapisme remplissent la verge, mais quant elle tent c’est par ventosité comme par cause moyenne, car tantost vient et tantost va, si comme dit Galien ou livre de interioribus. Et aussi ce se peut faire par humeur comme par cause remote.

Cette cause moyenne traduit le latin causa immediata et a pour sens ici : « Vapeurs qui se trouvent en un lieu du corps et qui agissent sur un autre lieu de ce même corps » [DFSM]. On note ainsi un enrichissement lexical par le développement de formes concurrentes, mais non pérennisées, puisqu’à cette forme est préférée celle de cause immédiate, peut-être pour sa proximité avec la forme latine, ou l’emploi de l’adjectif moyen dans d’autres ensembles plus courants qui porte ici à confusion, et donc pour des raisons de clarté de la forme. La restriction du sémantisme du mot cause par la description ne suffit pas, elle doit être appuyée par le recours à l’adjectif ou à un complément du nom, émergence progressive d’unités polylexicales dont la notion et le degré de figement pose problème. Le cas de cause moyenne est gênant dans un système de dénomination des causes qui au XVe siècle est stabilisé : en effet, si les définitions peuvent variées quelques peu d’un auteur – ou traduction – à un autre, ce système de dénomination se compose d’un hyperonyme cause et d’hyponymes relevant d’une terminologie scientifique dont la liste est arrêtée, des figements lexicaux, telle que cause intrinsèque ou encore cause lointaine qui se sont implantées dans la langue française médicale. Mais la surabondance des formations synonymiques pose la question de la maitrise de ces hyperonymes et du degré de figement et d’implantation de chacun dans la langue. Le chapitre 10 du Livre II commence par une énumération des causes :

aulcunes sont de choses fouraines, aulcunes de dedens, aulcunes sont avec matiere, aulcunes sans matiere, aulcune douleur est maladie par elle, aulcune par accident, aulcune douleur vient de cause privee du cervel [...]

Dans ce début de chapitre, on retrouve une insistance sur la hiérarchisation des causes et une importance du dénombrement : nous observons une présentation des causes premières de la douleur, au nombre de trois, soit « male complexion diverse, solucion de continuité en l’un et en l’autre » ; puis l’énumération des divisions particulières, soit des subdivisions au nombre de douze ; et se poursuivent par une reprise de chacune des douze subdivisions, elles-mêmes pouvant être subdivisées pour être décrites et explicitées :

Donc douleur aulcune est des causes extrinseques et sont plusieurs telles causes et sont ramenees a .XIII. La premiere, c’est cheoir, ferir ou hurter et les semblables. La seconde peut estre chaleur de souleil ou de feu ou d’air en temps d’aust ou unguent.

Ces ensembles offrent parfois des complications surprenantes comme dans la définition suivante :

Cause privee, c’est quant la cause prochaigne et antecedente est ou cerveau et qui ne vient pas d’autre part.

Il est donc nécessaire d’avoir une bonne maîtrise de la terminologie de l’auteur et de la traduction pour appréhender ce discours sur les causes, surtout quand elles rentrent dans la définition les unes des autres. La coordination de cause prochaigne et antecedente dans cet exemple peut ainsi être le signe d’une synonymie, mais aussi renvoyer à la juxtaposition de deux notions distinctes servant à définir la cause dont il est question, ici la cause privee. La question de la disparition de certaines créations au profit d’autres peut être parfois interprétée, mais pas toujours et avec précaution, même si le lexique des sciences, comme on le sait, va vers le sens d’une uniformatisation et une simplification du système.

Conclusion

Nous nous sommes concentrée sur trois cas, soit les réalités morphologiques et sémantiques issues ou en tension avec la forme cancer, le terme français rempe et la démultiplication des créations autour de la notion de cause. Plusieurs éléments ressortent ici, dont la difficulté à parler de néologie. En effet, la méconnaissance des témoins d’usage de la médecine restreint notre champ d’appréhension de son lexique en français. Il est difficile en l’absence de témoins complémentaires d’affirmer être face à une création lexicale, d’autant plus dans les travaux de vulgarisations, que sont ces traductions, qui peuvent répondre aux besoins de registres ou de technicités particulières. Les traductions françaises sont ainsi le reflet d’un processus d’émergence et de développement d’un lexique de spécialité, qui emprunte autant à la langue latine qu’à la langue française dans laquelle elle s’élabore. Les degrés de figement des unités polylexicales telles que goute rose ou encore cause privée et cause foraine peuvent être le signe d’un long processus de lexicalisation dans cette langue de spécialité.

Enfin, on le voit dès le texte latin lui-même, l’importance accordée à la dénomination, est avant tout celle d’une clarification de la matière, d’une organisation de la matière médicale, mais qui doit se placer au service de la connaissance et de la transmission du savoir et non être la première préoccupation du savant :

mais il n’y a point de peril, comment on les appelle en medecine, car medecine est science de choses et non pas de noms, si comme il est escript au second livre de morbo. [Imprimés, I, 22]

C’est bel est bien d’organisation de la matière qu’il s’agit, organisation de la matière médicale dans un but pratique et didactique. La réflexion sur la dénomination et la création lexicale est donc importante pour appréhender ces œuvres, puisqu’elle sous-tend la représentation d’un système, même si souvent elle soulève plus de questions qu’elle n’en résout.

1 Nous pensons en particulier aux travaux de David Trotter sur la Chirurgie d’Albucassis ou encore ceux de Michèle Goyens sur Évrart de Conty.

2 Notre étude s’appuie sur l’exemplaire imprimé à Lyon en 1495 par un anonyme et celui de 1509 imprimé à Paris par Jean Petit.

3 En effet, la compilation se compose de cures et recettes ou d’extraits d’œuvres de chirurgie à l’exception de deux ensembles. Le premier est le

4 La médecine scolastique désigne la médecine telle qu’elle est enseignée dans les universités médiévales.

5 La médecine était pratiquée en dehors des universités, notamment par les barbiers, mais aussi par des individus ne pouvant pas accéder aux

6 Les traductions des textes de médecine conservent une forme de bilinguisme, par la présence de termes isolés ou d’ensembles plus complexes latins.

7 Comme nous l’avons mentionné en note à l’occasion de l’introduction, la médecine était pratiquée en dehors des universités, par des professionnels

8 Plusieurs études ont permis de réaliser cette synthèse sur l’évolution du terme cancer : Barragan Nieto [2010], Demaitre [1998] et Delaveau [2002].

9 Dictionnaire du français Scientifique Médiéval (DFSM) issu du projet CREALSCIENCE-STIH/Paris-Sorbonne.

10 Nous laissons délibérément le cas des imprimés dans cette affirmation, puisqu’ils se distinguent des manuscrits du point de vue de la constitution

11 Nous n’avons pas encore situé cette cure dans les imprimés français du Lilium medicinae. Il se pourrait qu’il s’agisse d’un ajout par un copiste ou

12 Sur l’importance des causes, soulignée dans le cas de la pandémie de peste apparue au XIVe siècle, et leurs typologies voire les travaux de

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Notes

1 Nous pensons en particulier aux travaux de David Trotter sur la Chirurgie d’Albucassis ou encore ceux de Michèle Goyens sur Évrart de Conty.

2 Notre étude s’appuie sur l’exemplaire imprimé à Lyon en 1495 par un anonyme et celui de 1509 imprimé à Paris par Jean Petit.

3 En effet, la compilation se compose de cures et recettes ou d’extraits d’œuvres de chirurgie à l’exception de deux ensembles. Le premier est le fragment de Bernard de Gordon intitulé « Cy commence dix rigles parquoy l’on peult entendre pourquoy les femmes ont chascun mois leurs fleurs » et le second intitulé « La liste double par l’abbé. » traite de la confection et des usages d’eaux médicinales, dont l’eau de vie. Le traité sur les eaux médicinales relève de la pratique médicale et s’intègre donc logiquement avec l’ensemble des considérations chirurgicales de la compilation. Le fragment du Lilium medicine se compose de deux parties, une première consistant en l’énumération des dix règles explicatives des menstrues féminines, une seconde consistant en « la cure veritable pour gerir de toutes fleurs a l’avortement » accompagnée d’une « diette ». Ce chapitre sur les fleurs clôture les imprimés français du Lilium medicinae, mais non les imprimés latins. Enfin, cette partie est synthétique mais redondante puisque ces considérations sont exposées dans le livre 7 des chapitres VIII à XVIII.

4 La médecine scolastique désigne la médecine telle qu’elle est enseignée dans les universités médiévales.

5 La médecine était pratiquée en dehors des universités, notamment par les barbiers, mais aussi par des individus ne pouvant pas accéder aux universités, par exemple les femmes, ou encore les membres de communautés juives. Enfin, d’autres corps de métiers nécessitent un certain nombre de connaissances médicales comme les apothicaires. À ce sujet, voir les travaux de Danielle Jacquart ou encore de Geneviève Dumas.

6 Les traductions des textes de médecine conservent une forme de bilinguisme, par la présence de termes isolés ou d’ensembles plus complexes latins. Il s’agit dans la majorité des cas du lexique de la pharmacopée ainsi que des recettes de préparations médicinales.

7 Comme nous l’avons mentionné en note à l’occasion de l’introduction, la médecine était pratiquée en dehors des universités, par des professionnels de santé ou des profanes. Cette disparité d’usage de la médecine est similaire à celle des potentiels lecteurs des œuvres de médecine en français. Les études des inventaires de bibliothèques privées ou des inventaires d’après décès témoignent de l’hétérogénéité de ce lectorat. Voir par exemple les travaux d’Hanno Wijsman, de Lluís Cifuentes ou encore Danièle Iancu-Agou.

8 Plusieurs études ont permis de réaliser cette synthèse sur l’évolution du terme cancer : Barragan Nieto [2010], Demaitre [1998] et Delaveau [2002].

9 Dictionnaire du français Scientifique Médiéval (DFSM) issu du projet CREALSCIENCE-STIH/Paris-Sorbonne.

10 Nous laissons délibérément le cas des imprimés dans cette affirmation, puisqu’ils se distinguent des manuscrits du point de vue de la constitution, de la duplication et de la diffusion.

11 Nous n’avons pas encore situé cette cure dans les imprimés français du Lilium medicinae. Il se pourrait qu’il s’agisse d’un ajout par un copiste ou un traducteur. Cette cure n’en demeure pas moins identifiée comme appartenant au Lilium medicinae dans notre témoin, ce pourquoi nous la traitons comme telle.

12 Sur l’importance des causes, soulignée dans le cas de la pandémie de peste apparue au XIVe siècle, et leurs typologies voire les travaux de Danielle Jacquart ou encore ceux de Sylvie Bazin-Tacchella.

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Référence électronique

Adeline Sanchez, « La création lexicale en médecine médiévale : l’exemple des traductions françaises du Lilium medicinae de Bernard de Gordon, conservées dans les manuscrits français 1288, 1327 et 19989 de la Bibliothèque nationale de France », ELAD-SILDA [En ligne], 1 | 2018, mis en ligne le 01 mai 2018, consulté le 29 mars 2024. URL : https://publications-prairial.fr/elad-silda/index.php?id=261

Auteur

Adeline Sanchez

Université de Paris-Sorbonne, Sens, Texte, Informatique, Histoire : adeline.sanchez.gigon@gmail.com

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